Les géants de l’automobile sud-coréens, Hyundai et Kia, traversent une période de turbulences. Leurs actions sont en forte baisse alors qu’ils font face simultanément à des négociations tarifaires dans l’impasse avec les États-Unis et à une concurrence chinoise de plus en plus agressive sur le marché européen. Cette situation délicate met en péril leurs positions sur deux de leurs plus importants marchés d’exportation.
Incertitudes sur le marché américain suite au blocage des négociations tarifaires
L’inquiétude grandit sur les marchés financiers concernant l’avenir des exportations automobiles coréennes vers les États-Unis. Ce 15 septembre, l’action de Hyundai a enregistré une chute de 3,13 % pour s’établir à 216 000 wons, tandis que celle de Kia a reculé de 2,83 %, atteignant 102 900 wons.
Cette baisse est la conséquence directe des craintes liées à un désavantage tarifaire face à leur concurrent direct, le Japon. À partir du 16 septembre, les véhicules japonais seront soumis à un droit de douane de 15 % à leur entrée aux États-Unis, alors que les voitures sud-coréennes se verront imposer un tarif de 25 %. Il s’agit d’un renversement de situation majeur : jusqu’à présent, grâce à l’accord de libre-échange entre la Corée du Sud et les États-Unis (KORUS FTA), les entreprises coréennes bénéficiaient d’un avantage de 2,5 % par rapport aux Japonais. Elles se retrouvent désormais à devoir payer des droits de douane supérieurs de 10 points de pourcentage, une situation qui risque de peser lourdement sur leur compétitivité. Face à ce blocage, Yeo Han-koo, le chef du bureau des négociations commerciales au ministère de l’Industrie, s’est envolé pour Washington D.C. afin de mener des discussions de suivi avec des responsables américains, notamment Jamieson Greer du Bureau du représentant américain au commerce (USTR).
L’offensive chinoise en Europe, un défi majeur pour Hyundai et Kia
Pendant que la situation se complexifie aux États-Unis, un autre front s’est ouvert en Europe. Les constructeurs automobiles chinois y réalisent une percée spectaculaire, malgré les droits de douane élevés imposés par l’Union Européenne sur leurs véhicules électriques. Leur stratégie : contourner ces barrières en misant sur les modèles hybrides.
Selon les données du cabinet d’analyse britannique JATO Dynamics, au cours du premier semestre de cette année, les marques chinoises ont vendu un total de 347 135 véhicules dans 28 pays européens. C’est une augmentation impressionnante de 91 % par rapport aux 181 897 unités vendues à la même période l’an dernier. Leur part de marché a ainsi presque doublé, passant de 2,7 % à 5,1 %. Des entreprises comme BYD, Xpeng, Leapmotor, ainsi que les marques Omoda et Jaecoo (appartenant au groupe Chery), sont les fers de lance de cette croissance. BYD, en particulier, a vu ses ventes bondir de 311 % pour atteindre 70 500 unités.
La stratégie hybride, clé du succès chinois
Cette performance est d’autant plus remarquable qu’elle intervient dans un contexte de barrières douanières renforcées. Depuis octobre 2023, l’UE applique des droits compensateurs additionnels sur les véhicules électriques importés de Chine, accusant Pékin de fausser la concurrence via des subventions gouvernementales illégales. Le taux de douane, initialement de 10 %, a ainsi été porté à une fourchette allant de 17,8 % à 45,8 %.
Pour déjouer ces mesures, les constructeurs chinois ont massivement investi le segment des véhicules hybrides, qui ne sont pas concernés par ces surtaxes. Avec succès : le SUV hybride rechargeable de taille moyenne de BYD, le Seal U, s’est classé troisième des ventes de sa catégorie en Europe au premier semestre. De son côté, le Jaecoo 7, un SUV crossover compact, a atteint la neuvième place en juin.
Hyundai et Kia en perte de vitesse sur le marché européen
Face à cette dynamique, Hyundai et Kia peinent à maintenir leur position. Leurs ventes combinées en Europe ont diminué de 4,1 % au premier semestre, pour un total de 631 027 unités. Bien que ce volume reste supérieur à celui des marques chinoises, la tendance est à la baisse.
Leur part de marché s’est érodée, tombant à 8,5 % le mois dernier, soit une baisse de 0,7 point de pourcentage en un an. Kia a été particulièrement touchée avec une chute de ses ventes de 8,5 % en un mois. Un expert du secteur automobile analyse : « Si les ventes de véhicules 100 % électriques de Hyundai et Kia se sont améliorées, ils ont perdu du terrain sur le marché crucial des hybrides rechargeables, où les entreprises chinoises se sont montrées bien plus compétitives. » Actuellement, Hyundai propose en Europe deux modèles hybrides rechargeables (Tucson, Santa Fe), tandis que Kia en commercialise quatre (Ceed, Niro, Sportage, Sorento), une offre qui semble désormais insuffisante pour contrer l’offensive chinoise.